Au Mali, le pouvoir ordonne la suspension de RFI et de France 24

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La décision prise jeudi par Bamako est le dernier épisode de la dégradation des relations de la junte avec la France, sur fond de nationalisme exacerbé et d’alliance avec Moscou.

Colonel Assimi GOÏTA © Malick MBOW
Colonel Assimi GOÏTA © Malick MBOW

Après avoir donné le 31 janvier à l’ambassadeur de France 72 heures pour quitter le pays, puis invité, le 18 février, Paris « à retirer, sans délai, les forces Barkhane et Takuba du territoire national », la junte au pouvoir au Mali a annoncé, jeudi 17 mars, avoir suspendu « jusqu’à nouvel ordre, la diffusion de Radio France internationale (RFI) (…) et de la télévision France 24, ainsi que toutes leurs plateformes digitales sur toute l’étendue du territoire ». La mesure touche également l’ensemble de la presse locale qui se voit interdite de reprendre les informations publiées par ces deux médias publics français, toujours très suivis en Afrique francophone.

En cause selon Bamako, « de fausses allégations faisant état d’exactions commises par les forces armées maliennes, contre des civils », pourtant respectivement publiées par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU le 8 mars, l’organisation Human Rights Watch (HRW) le 15 mars et RFI les 14 et 15 mars. Alors que l’armée malienne est à l’offensive dans le centre du pays contre les groupes djihadistes et communique quasi quotidiennement sur ses reconquêtes territoriales, Michèle Bachelet, l’ancienne présidente chilienne, avait tout d’abord pointé « les graves violations du droit international des droits de l’homme et du droit humanitaire » commises par les forces de défense et de sécurité, notamment celles engagées dans l’« Opération Keletigui ».

HRW a estimé par la suite que ces dernières seraient impliquées dans le meurtre d’au moins 71 civils depuis décembre 2021. Quant à l’enquête de RFI, comme celle publiée par Le Monde le 13 mars ou celle de Jeune Afrique deux jours plus tôt, elle met en lumière l’implication de « soldats blancs », identifiés comme les mercenaires du groupe russe Wagner, dans des tortures et des meurtres commis dans le centre du pays.
« Des accusations infondées »

Il n’en fallait pas plus pour que les autorités maliennes en déduisent que « la synchronisation de ce matraquage médiatique » s’inscrit dans « une stratégie savamment préméditée visant à déstabiliser la transition, démoraliser le peuple malien et discréditer les vaillantes FAMa » et osent la comparaison entre les deux médias publics français et « la tristement célèbre radio Mille collines », outil de propagande haineuse durant le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994.

Depuis la mi-2021, et l’annonce de la fin de l’opération « Barkhane », le Mali a basculé dans un nationalisme exacerbé et une alliance avec Moscou qui se traduit par une rupture avec Paris et une bonne partie de ses voisins d’Afrique de l’Ouest. Selon des sources occidentales, un millier de paramilitaires de Wagner sont désormais déployés au Mali. Et les élections destinées à ramener l’ordre constitutionnel, rompu par le coup d’Etat d’août 2020, ont été reportées de la fin février jusqu’à une date inconnue.

Jeudi 17 mars, Emmanuel Macron a condamné une décision « grave », « signe d’une course en avant vers le pire ». La diplomatie européenne a considéré la mesure prise par Bamako comme « inacceptable », basée sur des « accusations infondées ». France Médias Monde, la maison mère de France 24 et de RFI, a pour sa part protesté « vivement contre les accusations infondées mettant gravement en cause le professionnalisme de ses antennes. » Les six émetteurs de RFI ont été coupés jeudi après-midi mais les programmes de France 24, émis par satellite, étaient eux toujours disponibles au Mali.

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